vendredi, avril 27, 2012

Avoir la vie éternelle ou être dans la vie éternelle.


la liturgie propose en ce moment une lecture du chapitre 6 de l'évangile de Jean, chapitre qui commence par la multiplication des pains (réponse au besoin biologique de l'être humain) et qui se continue par un long discours sur la manière dont Jésus veut donner une autre vie, à savoir se nourrir de Lui. Que ce discours reste très difficile à comprendre si on le prend au pied de la lettre certainement, car qu'est ce qu'un pain vivant? Est ce que comme dans les contes c'est un pain qui se régénère en permanence quand on l'a consommé?  Est ce un pain qui ne moisit pas? qui ne se dégrade pas?Est ce un pain qui comme le fruit de l'Arbre de Vie de l'Eden donne une vie qui n'en finit pas?Est ce le viatique que nous désirons tous: une énergie qui nous permettrait de ne pas être dépendant des nourritures terrestres? Bref, cela pose des questions, mais ne les résout pas.

Avoir ou posséder la vie éternelle est un peu l'obsession de toute la Bible et plus particulièrement des évangiles. Mais il est important de noter que dans les synoptiques, la question est: que faut il faire pour avoir la vie éternelle en héritage (donc après la mort). La réponse de jésus au "jeune " homme riche "Toi, vends tout ce que tu as et suis moi "Lc18, 22, montre que cette vie éternelle, peut déjà se commencer ici, même si le fait de vendre ses biens est une sorte d'assurance sur l'Au-delà, puisqu'elle est dans la relation qui se crée entre cet homme et Jésus. Cela se joue déjà dans le ici et dans le maintenant.

Et il me semble que c'est bien cela qui se dégage de l'évangile de Jean. Il y a 17 occurrences de ce terme "vie éternelle" ce qui est considérable.  Et l'obtention n'est pas liée à un faire  (ce qui ne l'exclue pas) mais à un "être avec". Elle est liée à la foi en cet homme qui dit être Fils du Père: "la vie éternelle c'est qu'ils te connaissent toi le véritable Dieu et Celui que tu as envoyé, Jésus Christ" jn 17,3.

Or cette connaissance là, elle commence dès ici bas, ce qui pour moi veut dire que la vie éternelle n'est pas pour un futur mais pour un présent. Je pense qu'il faut différencier "être en vie" qui renvoie au biologique et "être vivant", qui est bien différent, car c'est de relation qu'il est question.

A la limite, ce qui se passera après ma mort n'est pas un moteur, je veux dire que ce que j'essaye d'être n'est pas lié à un désir de survie, à une certitude de vivre "bien" après ma mort biologique. Ce qui m'importe c'est de vivre aujourd'hui (même si le biologique dit qu'une fin se profile comme pour tout être humain) d'une manière qui me permet finalement d'être en relation avec moi-même, avec les autres et avec Dieu (même si pour pour moi Dieu est plus ce qu'il n'est pas que ce que je peux en dire).

Ou pour le dire autrement:l'important pour moi, ce n'est pas d'avoir la vie éternelle comme une possession ou comme un dû, mais d'être dans la vie éternelle dans le ici et maintenant.

A la limite il s'agit de remplacer au moins partiellement la dimension temporelle (qu'en est il du temps après la mort biologique) par une dimension spatiale: que deviendra la relation établie ici bas dans cet autre monde? Ce que je veux dire c'est que ce qui est important pour moi c'est que se crée en moi petit à petit un coeur en expansion, un coeur qui se laisse conduire et modeler par l'Amour (ou la Parole) et d'espérer que cela continuera mais sous une autre modalité après la mort.





lundi, avril 23, 2012

brève...

On nous rappelle souvent que Dieu a passé Alliance avec Abraham puis avec le peuple (Moïse) et que ces alliances demeurent et que nous n'avons à faire comme si la nouvelle Alliance (la notre) détruisait ce qui avait été fait. Nous ne remplaçons pas le peuple Juif, nous ne prenons pas sa place. Oui il est bien question dans le premier testament d'une alliance nouvelle, d'une alliance écrite dans le coeur, une alliance nouvelle qui prépare l'alliance du soir de la Cène.

Mais je crois qu'il y a une différence fondamentale entre nous et le peuple juif, c'est la manière d'aborder les écritures.

Je veux dire que Jésus montre quand il discute avec les scribes qu'il connaît la manière de faire des érudits de l'époque (et le Talmud de Babylone était déjà élaboré en partie), mais quand on lit "il leur ouvrit l'intelligence à l'écriture" je crois qu'il se passe quelque chose de radicalement différent. Ce n'est plus la pensée qui fonctionne pour mettre en relation, mais c'est une pensée qui s'ouvre, qui interprète, qui comprend que par exemple (et c'est juste un exemple) on peut voir dans la ligature d'Isaac une préfiguration de ce que va vivre Jésus.

Les histoires rapportées dans la bible prennent alors un autre sens, une autre saveur et cela c'est le cadeau du  Ressuscité.

Cette intelligence là est autre. Elle est liée au don de l'Esprit et elle permet de comprendre autrement le dessin de Dieu et comment Jésus réalise les écritures. Et cette intelligence là (intelligence qui n'est pas une sagesse) permet de faire corps avec le texte, de le laisser prendre corps en soi et de comprendre comment elle révèle peu à peu, petit à petit, en se renouvelant.  souvent, en s'enrichissant avec le temps, le travail de Dieu, travail qui donne naissance aux hommes renouvelés, aux hommes vivants, aux hommes debouts.

P.S. Quand on parle d'Alliance dans le Bible est est question d'une Alliance entre un "très fort" Dieu et un "très faible" le peuple élu. Le petit pour obtenir et conserver la protection doit en quelque sorte se plié aux règles du Fort. Mais je me plais ) rêver que cette Alliance fait de nous des alliés avec Dieu et qu'il nous compte comme ses alliés dans le combat contre le Mal et que nous avons quelque chose à faire là dedans et que cette nouvelle Alliance qui fait de nous des frères de Jésus nous donne justement cette capacité là: être des alliés..

lundi, avril 16, 2012

Ça c'est une résurrection Ap 11, 8-13

Comme je l'ai déjà signalé, nous nous sommes attaqués (le terme n'est pas trop fort) à la lecture du livre de l'Apocalypse.

L'impression que j'ai aujourd'hui c'est que c'est du grand spectacle, même si parfois cela nous dépasse complètement. Il y a du combat dans le ciel, il y a du combat sur la terre, et d'une certaine manière les hommes en font les frais, même s'ils portent sur leur front le nom de l'Agneau. Si l'on peut faire constamment des parallèles avec les fléaux de l'exode et avec les autres apocalypses, il semble que ce qui est annoncé c'est que la peur renforcera les comportements mauvais et enfoncera au lieu de pousser à la conversion, mais que ceux qui ont reconnu (à travers d'autres signes moins tonitruants) que Jésus était le Fils de Dieu et qu'il était le Vivant n'ont pas à avoir peur.

Il me semble que le Jésus de l'Apocalypse est à la fois un Justicier qui va rendre chacun selon ses oeuvres, qui va enfin faire payer les dettes, et un guerrier, même si par ailleurs  il est l'agneau "égorgé". Je me suis d'ailleurs demandé si ce livre n'avait pas été bâti (dans son écriture) autour de certaines hymnes qui se chantaient dans les assemblées de cette époque. Il m'apparaît aussi que au travers de tous ces déchirements, de toutes ces destruction, de tous ce combats, est aussi l'histoire d'un enfantement, d'une mise au monde, d'un monde nouveau et que cet enfantement là se fait dans la douleur et dans les hurlements.

Par ailleurs, je trouve que ce fracas s'oppose à la simplicité des évangiles. Que de fois les pharisiens demandent des signes du ciel à Jésus, signes qu'il refuse de donner parce que justement il n'est pas le messie triomphant, le chevaucheur de nuées (du moins à ce moment là, dans ce temps là, à cette époque là). Il n'impose pas, il ne s'impose pas, et même la résurrection et l'ascension se font dans le relatif silence. Il faudra la Pentecôte pour que les choses s'animent.
Il s'éleva, et une nuée le déroba à leurs  yeux  Ac,1, 


De ce fait j'ai été un peu saisie par le texte suivant "Ap11, 11-13", qui rapporte la mise à mort des deux témoins (qui sont peut être des figures de Moïse et d'Elie) vaincus pas la Bête (le Mal), dont les corps sont  exposés sur la place publique d'une ville (qui peut être Jérusalem) pendant 3 jours et demi. Tout le monde se réjouit et se congratule de cette mort (comme peut-être le grand conseil s'est réjouit de la mort de Jesus).Ap11,11-13: Mais après ces trois jours et demi, un souffle de vie, venu de Dieu entra en eux et ils se redressèrent (résurrection). Alors une grande frayeur tomba que ceux qui les regardaient. Ils entendirent une voix forte qui du ciel leur disait: "Montez ici" (ascension). Et ils montèrent qu ciel dans la nuée, sous les yeux de leurs ennemis. A l'heure même, il se fait un violent tremblement de terre, le dixième de la cité s'écroula et sept mille personnes périrent dans cette catastrophe. Les survivants saisis d'effroi, rendirent gloire au Dieu du ciel.

Si l'on compare ce texte avec ceux des évangiles nous rapportent de la résurrection de Jésus et de son ascension, on ne peut qu'être surpris par la pauvreté des textes évangéliques. Tout se passe dans la discrêtion. Il n'y a pas de foule, il n'y a pas de manifestations dignes de l'Horeb et les compagnons de Jésus malgré le témoignage des femmes sont incrédules. Si la mort de Jésus a pu être constatée par le peuple, les événements qui suivent et qui sont l'essentiel de notre foi (il est ressuscité des morts et monté au ciel) ne sont vus que par peu de personnes, et même celles qui l'ont vu, bien que Jésus (Luc) leur ait ouvert l'intelligence à la compréhension des écritures (ils sont enfin devenus des rabbis) ne pourront témoigner qu'après la Pentecôte.

Certes l'évangile de Matthieu qui déjà au moment de la passion a fait ressusciter des morts dont personne ne sait ce qu'ils sont devenus en attendant la résurrection, parle bien de tonnerre, de gardes qui tombent au sol, d'un ange, mais on ne peut pas dire que cela ait effrayé qui que ce soit, ni surtout que cela ait entraîné une conversion. Tout le monde garde le silence. Même après que Jésus ait soufflé sur ses disciples (Jn20) ils continuent  rester entre eux...

Le Jésus de l'Apocalypse est peut-être là  pour donner de l'espoir à ceux qui sont persécutés parce qu'ils se réclament de son nom. Justice leur sera rendue. Mais ce Jésus, l'alpha et l'oméga, même s'il essuiera toutes larmes de leurs yeux reste très différent de ce Jésus qui n'est pas reconnu même par ses proches, qui est confronté à leur incrédulité et qui reste ce Jésus "doux et humble de coeur" qui n'a rien à voir avec le Christ triomphaliste (il vaudrait mieux triomphant) de l'Apocalypse.

Peut être faut il accepter que ces deux aspects puissent coexister et se compléter, mais je dois reconnaître que cela m'est difficile.