vendredi, octobre 27, 2017

"Dis à mon frère" Lc 12, 13

Luc 12, 13: "Maître, dis à mon frère de partager avec moi notre héritage".

Le Prêtre qui commentait cet évangile (Luc 12, 13-21), qui se termine par une parabole expliquant que l'on n'emporte pas les biens terrestres avec soi dans la mort, nous a dit que s'il s'écoutait il ne ferait une homélie qu'une fois par mois. En effet il pense que pour comprendre une parabole il faut rester dessus un bon mois pour qu'elle prenne sens (pour lui) et donc qu'il puisse en parler. 

Du coup il n'a pas ou peu commenté cette parabole, mais proposé plutôt une manière de laisser le texte prendre corps en soi. Il a juste fait un lien avec le chapitre 3 de l'Apocalypse;  je crois qu'il s'agit du verset qui s'adresse à l'église de Sardes: "Je sais que ton nom est celui d'un vivant, mais tu es mort", mais mis à part la notion de se croire en vie quand on a des richesses et être mort parce qu'on ne s'occupe que de soi, je n'ai pas trop compris le lien. 

Par contre un autre lien s'est présenté pour moi. Car la petite phrase du début du texte:
"demande à mon frère de…", s'est mise à résonner avec autre phrase du même ordre et rapportée par le même évangéliste: " dis à ma sœur de... ".

Et dans les deux cas, Jésus se centre sur celui ou celle qui a fait la demande, comme pour le faire aller plus loin. En aucun cas, il ne prend parti. Il ne parle pas à Marie, il ne parle pas au frère, il ne fonctionne pas à l'autorité, il ne s'attribue pas non plus la moindre autorité, lui qui pourtant commande aux éléments.

Par ailleurs, mais cela c'est mon imaginaire, je peux aussi supposer que si Jésus est en train de parler, ce qui est le cas dans la maison de Marthe, mais aussi le cas du chapitre 12, puisque Jésus s'adresse à la foule, peut-être n'aime-t-il pas qu'on l'interrompe quand il est en train de parler. Ce qui me fait penser que la réponse donnée ne l'est pas forcément sur un ton très agréable, même si Jésus par la suite reprend son enseignement à la foule à l'aide d'une parabole.

Peut-être que le projet de Jésus est de permettre aux demandeurs, qui quelque part se sentent lésés, de leur faire comprendre qu'ils n'ont pas à l'utiliser lui pour obtenir quelque chose de l'autre. Qu'il ne sert pas d'intermédiaire, que personne ne peut se servir de lui et de son autorité pour obtenir quelque chose. 

Car la place de Marie est bien aux pieds de Jésus, et pour l'héritage peut-être vaut il mieux que le frère aîné le garde, puisque d'après la parabole - pardon pour l'expression - cet héritage il ne l'emportera pas au Paradis. Et à quoi bon être riche si c'est pour mourir sans pouvoir profiter de sa richesse? Il y a des soucis liés à la richesse, et si elle vous coupe des autres (ce qui se passe dans la parabole du riche et de Lazare) et donc vous exclut de la vie éternelle, alors à quoi bon.

Peut-être faut-il laisser faire l'autre, accepter que les choses ne se passent pas comme on le voudrait. Et je pense que c'est important, car c'est sortir de la maîtrise, du contrôle de l'autre, de la mainmise sur lui.

Peut-être que l'on peut demander des choses pour soi à Jésus, on peut demander d'accepter des situations qui peuvent nous énerver, nous déranger, mais que nous n'avons pas à lui demander qu'il "oblige" l'autre à changer, parce que cela nous arrange. Et cela peut nous aider à regarder autrement ce qui se passe autour de nous dans notre relation à l'autre.

Je pense que le refus de Jésus de prendre partie est à prendre dans une optique de guérison. Marthe, comme cet homme sorti du milieu de la foule, sont soit jaloux, soit envieux, soit en colère. Et de cela, Jésus veut les guérir. Il leur fait comprendre qu'ils doivent, eux, changer.

Mais je pense que lorsqu'on est victime, au sens fort, de quelqu'un, il peut-être plus que légitime de demander à Jésus (ou à l'Esprit Saint) de faire une brèche dans le cœur de l'autre, pour que cet autre ouvre les yeux et se rende compte du mal qu'il est en train de faire. Je pense aussi que ces demandes là  doivent être des demandes collectives, parce qu'elles touchent à l'expulsion du mal.


Mais ce texte finalement me permet de comprendre que si j'en veux à quelqu'un, fut-il ou non de ma famille, Jésus ne fera pas de miracle à ma place, il ne changera pas le cœur de l'autre, mais il m'aidera à changer mon cœur, et de ce fait à sortir de la position de victime; et c'est cela qui aujourd'hui est important pour moi.

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