mardi, avril 03, 2018

"Seigneur si c'est toi qui l'a emporté..Jn 20, 15

"Le prenant pour le jardinier, elle lui dit Seigneur"… Jn 20,15

Ce jour, mardi de l'Octave de Pâques, l'évangile choisi rapporte la rencontre entre Marie de Magdala et Jésus. 

Pour situer les choses, Marie qui a vu le lieu où le corps de son bien-aimé a été déposé par Joseph et Nicodème, s'est levée aux aurores, le lendemain de la mort de Jésus, peut-être pour pleurer parce qu'elle est dans une immense détresse, sur le corps de son aimé, ou aussi vérifier que tout à été fait selon les règles, que le corps a bien reçu tous les soins, parce qu'avec les hommes, on ne sait jamais…

Seulement en arrivant,  elle a la mauvaise surprise de trouver la pierre roulée, ce qui lui a fait peur. Pierre roulée, tombeau dans lequel quelqu'un a pu entrer, corps profané, corps volé. Or un corps qui disparaît, un corps qui n'est plus là, c'est de l'ordre de l'impensable. C'est même traumatisant et après la mort de Jésus sur la croix, elle n'a vraiment pas besoin d'un traumatisme supplémentaire: la perte du corps.

Elle est allée prévenir Pierre et Jean, avec sûrement l'idée qu'eux vont chercher le corps. Seulement ce n'est pas du tout ce qui se passe. Pour Jean, voir les linges pliés est le signe que la résurrection a eu lieu, et que le corps n'est pas à chercher. Quant à l'autre, Pierre, il est entré et s'en est retourné chez lui; et Marie si je puis dire en est pour ses frais. 

Alors, à son tour, même si elle ne rentre pas dans le tombeau, elle regarde. Et là elle voit deux anges, l'un à la tête, l'autre aux pieds de la place où le corps avait été étendu. Ces anges, pour moi, évoquent ceux qui sont sur le coffre qui renferme l'arche d'alliance avec les deux tables. Mais là, les tables de la loi ne sont plus là, car la nouvelle alliance est réalisée. 

Que ces anges lui parlent, "Femme pourquoi pleures-tu", ne la surprend pas. Elle est ailleurs. Elle est dans son idée fixe: "On a volé le corps de celui que j'aime"; le reste elle n'en n'a rien à faire. Et elle ne parle pas du pourquoi de sa tristesse mais de son angoisse: le corps de mon bien-aimé a disparu et je veux savoir où il est. 

Quand Jésus s'adresse à elle, avec la même question "Femme pourquoi pleures-tu, qui cherches –tu" ce qui montre bien que cet homme qu'elle prend pour le jardinier sait quelque chose, même si elle ne le reconnaît pas, car elle est encore si l'on peut dire dans son aveuglement, elle s'adresse à lui en le nommant "Seigneur".

J'ai été très surprise en écoutant la lecture de cette rencontre dans la traduction liturgique, de ne pas entendre ce mot "Seigneur". Cela peut paraître curieux d'appeler un jardinier "Seigneur", mais de là à supprimer ce vocable, cela me paraît un peu "gros", car chez Jean rien n'est anodin. 

Certes, ce terme qui s'adresse à un jardinier peut sembler étonnant, mais Marie se trouve  dans un lieu privé, et elle sait que le corps a été déposé dans une sépulture qui a été prévue pour quelqu'un d'autre (sûrement quelqu'un de riche, pour pouvoir s'offrir une pareille sépulture et en même temps accomplir les écritures: Is 53,9). Alors, nommer Seigneur cet homme qui ressemble à un jardinier mais qui est aussi le gardien des lieux, cela se comprend. Et peut-être qu'il ne fait que son travail: évacuer un corps qui n'avait rien à faire là.

Seulement, dans le verset suivant, Marie qui est "retournée" quand elle entend le jardinier l'appeler par son prénom, le nomme "Rabbouni" c'est-à-dire "Maître" .

Et les deux termes, qui se suivent directement: "Seigneur et Maître", cela renvoie au chapitre 13: 

Après le lavement des pieds, ce sont les deux titres que Jésus se donne (Jn 13, 13-14): "Vous m'appelez Maitre et Seigneur, et vous faites bien, car je le suis, si donc je vous ai lavé les pieds, moi qui suis le Seigneur et le Maître, vous devez vous aussi vous laver les pieds des uns des autres."

Alors il me semble que la suppression de ce titre que je considère comme prophétique, donné à l'homme qui est la Résurrection et la Vie, c'est très dommage.

Marie de Magdala donne à Jésus les titres qui sont les siens, les titres que lui-même revendique, ces titres que nous lui donnons aujourd'hui dans leur plénitude, parce que la Résurrection a fait de Lui à la fois le Seigneur, mais aussi le Maître, celui qui a la pleine Connaissance et qui nous la transmet par son Esprit.

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